Belle-Ile, l'insularité solaire
Ce petit caillou du début de la Bretagne est surprenant. On en a fait le tour en 70 km par le sentier côtier (en apprenant par la même occasion que le GR34 ne se contentait pas de faire le tour des côtes bretonnes mais aussi de chacune des nombreuses îles...) et on a pas été déçues.
De criques en plage, en port en landes on y a rencontré de nombreuses espèces protégées, telles que la bruyère vagabonde, le crave à bec rouge ou l'abeille noire (l'île n'a pas les mêmes abeilles que le continent et il est interdit d'importer du matériel d'apiculture ayant servi pour ne pas amener les maladies.) Et partout la beauté.
Les insulaires, au nombre de 5000, ont une histoire passée et actuelle passionnantes.
L'ile a été disputé par de nombreux marquis, de nombreux états (Fouquet, couronne de France puis d'Angleterre, ensuite échangée contre Minorque) puis a servi de terre d'accueil aux acadiens persécutés, ces colons français du Nord Amérique. Pendant la Seconde Guerre Mondiale elle a été occupée par les Allemands, qui en ont fait un bastion du mur de l'Atlantique.
Et maintenant, une intercommunalité (4 communes avec chacune une école) tente de faire en sorte que les habitants puissent vivre au-delà de l'activité touristique. Tous les hivers, des tempêtes stoppent la circulation des bateaux qui la relient au continent, et l'île est isolée. Les insulaires ont l'habitude. Ce à quoi ils ne s'attendaient pas, c'était le confinement, à une période qui commence à voir affluer les touristes. L'ile, dont le taux de suicide est déjà habituellement plus élevé que la moyenne nationale, a beaucoup sollicité les aides psychologiques par téléphone. Le troc a dû remplacer la vente, beaucoup se sont retrouvés sans revenus (quasi tous les insulaires ont un travail d'été et un travail d'hiver) des œufs contre du riz, du fromage contre des patates.
Malgré les efforts fait pour faire progresser l'auto suffisance (l'ile compte plusieurs agriculteurs, un maraîcher bio, quelques pêcheurs, une distillerie de bons whiskey un abattoir communal!) On s'est rendus compte que l'approvisionnement qui vient par bateau tous les matins, et l'argent nécessaire pour acheter ce qu'ils ramènent sont encore trop important.L'île produit son lait, mais doit l'envoyer sur le continent pour la mise en bouteille, puis il est ensuite rapatrié.
Avec une population en augmentation, des ouvertures de classe, c'est un endroit où les jeunes reviennent pour les jobs étudiants. Mais s'y installer est plus complexe, de nombreux terrains ont été utilisé pour d'immenses résidences secondaires, les prix des terrains ont flambé. L'intercommunalité ne délivre plus de permis de construire pour les résidences principales, mais ca reste compliqué.
En promenant sur nos cailloux on s'est encore questionné sur la place du touriste, ce qu'on induit en voyageant, qu'est ce qu'on fait gagner ou perdre aux habitants par notre visite. Et encore une fois on a pas trouvé de réponse toute faite, si ce n'est qu'il faut échanger avec les gens, s'émerveiller des solutions qu'ils trouvent aux problèmes locaux, peut-être consommer le plus local et le plus direct possible même si c'est parfois compliqué avec la communication parfois trompeuse certaines entreprises(la conserverie belle iloise n'a rien sur l'île si ce n'est une boutique avec un emploi saisonnier!)
En partout, on a été accueilli par des gens qui aiment leur lieu de vie, qui veulent le partager, qui nous ont conseillé des paysages et des produits qui valaient le détour. On essaiera de faire ce que tout le monde nous a dit, revenir en hiver pour vivre une tempête !
Le phare des Poulains, à la pointe de l'île. Dedans, une expo avec un macaron Total, qui en a financé une partie, mais n'a pas déboursé un centime pour le nettoyage des plages à la suite de la catastrophe de l'Erika
On était pas aussi haut qu'au Guatemala, mais les paysages valaient le détour!
Toutes les plages accessibles au débarquement ont été fortifiées par Vauban, ce qui n'a pas empêché les anglais d'envahir l'île en 1761 (mais il aura au moins contribué à donner du cachet à de petites criques!)
De criques en Landes, on voit à la hauteur de la végétation que le vent et les embruns restent hostiles la moitié de l'année.
Port Sauzon, l'une des 4 communes de l'île
Deux espèces rares de marcheuse ici en pleine activité de découverte